CANTIQUE 91 

” LES TENDRESSES DE LA CHARITE DU PROCHAIN ”

Titre modifié : La charité du prochain

I/

                     1
Le Très-Haut veut absolument
Que l’homme aime l’homme son frère,
C’est son plus grand commandement
Et de créateur et de Père.
Il en punit les transgresseurs
Avec les dernières rigueurs. ( Bis )
                     2
La charité renferme en soi
La sainteté la plus parfaite,
Elle accomplit toute la Loi,
Sans elle aucune loi n’est faite.
C’est le seul lien des vertus
Sans lequel, elles ne sont plus. (Bis )
                  3
Voici mon grand commandement,
Nous dit à tous Jésus-Christ,
Que vous vous aimiez tendrement
Et de même que je vous aime.
Il est nouveau dans sa douceur,
Il est ancien dans sa grandeur. ( Bis )

Tableau du bon samaritain
Tableau du bon samaritain

II/

              4
La marque du prédestinée
Est la charité pour son frère,
C’est Jésus qui nous a donné
Cet infaillible caractère,
Pour distinguer ses serviteurs
Parmi les faux adorateurs. ( Bis )

                    5
Dieu donne à tous, même aux pécheurs,
Sa douce pluie et sa lumière.
Aimons donc nos persécuteurs,
Afin d’imiter ce bon Père,
Qui par son immense bonté
Surmonte toute iniquité. ( Bis )
                    6
Jésus pardonne à ses bourreaux,
Il prie en leur faveur son Père.
Vous fait-on bien autant de maux,
Autant de sujets de colère ?
Un Dieu mourant, pardonne à tous.
Pécheurs calmez votre courroux.
Jésus mourant, se donne à tous.
Pécheur, aimez votre prochain.
                    7
Aimez du cœur et de la main
Et non seulement de la bouche
Versez l’aumône dans son sein,
Que ce qui le touche, vous touche.
Jésus est tout de feu pour nous
Et nous tout de glace envers tous.
Seigneur n’ayant point de retour
Digne de votre Amour extrême,
Faites que j’aille nuit et jour
Crier partout que l’on vous Aime !!!

Cantique originale de Saint Louis-Marie GRIGNION de MONTFORT

CANTIQUE 91 : ” LES TENDRESSES DE LA CHARITE DU PROCHAIN  “

1
Je ne veux plus chanter en vain,
Car en chantant mon cœur s’explique
Et la charité du prochain
Ouvrant mon cœur fait ce cantique:
Vive la sainte charité
Dont je sens mon cœur transporté
2
Par elle on aime tendrement
Son prochain tout comme soi-même,
Pour l’amour de Dieu seulement,
Parce qu’il commande qu’on l’aime
Sans prendre égard à ses défauts,
Sans avoir horreur de ses maux.
3
Le Très-Haut veut absolument
Que l’homme aime l’homme son frère,
C’est son plus grand commandement
Et de Créateur et de Père.
Il en punit les transgresseurs
Avec les dernières rigueurs.
4
Sa seule autorité suffit,
Il suffit qu’il parle et commande,
Malheur à qui désobéit,
Car la vengeance en sera grande.
Dieu s’en déclare l’ennemi,
Fût-il d’ailleurs son grand ami.
5
Tout homme est, dit ce grand Seigneur,
Mon beau portrait, ma vive image;
On me touche au vif jusqu’au cœur
Autant de fois que l’on l’outrage.
Je vengerai ce déshonneur
Dans le grand jour de ma fureur.
6
La charité renferme en soi
La sainteté la plus parfaite,
C’est l’accomplissement de la loi,
Sans elle aucune loi n’est faite,
C’est le seul lien des vertus
Sans lequel elles ne sont plus.
7
C’est elle qui, par sa beauté
Et sa pureté lumineuse,
Couvre et détruit l’iniquité
La plus grande et la plus nombreuse.
Un cœur est plein de pureté
Dès qu’elle y règne en vérité.
8
Ayez un amour mutuel
L’un pour l’autre, nous dit saint Pierre.
C’est là le point essentiel,
Il n’est rien si grand sur la terre.
L’amour est la grande perfection
De toute la religion.
9
La marque du prédestiné
Est la charité pour son frère,
C’est Jésus qui nous a donné
Cet infaillible caractère,
Pour distinguer ses serviteurs,
Parmi les faux adorateurs.
10
Voici mon grand commandement,
Nous dit à tous Jésus-Christ même,
Que vous aimiez tendrement
Et de même que je vous aime.
Il est nouveau dans sa douceur,
Il est ancien dans sa grandeur.
11
Mais comment nous a-t-il aimés?
Sans intérêt et sans mesure,
Jusqu’à mourir tout consumé
De la charité la plus pure.
Jésus est tout de feu pour nous
Et nous tout de glace envers tous.
12
Voyez l’amour, voyez l’ardeur
Des premiers chrétiens de l’Église,
Ils n’avaient qu’une âme et qu’un cœur,
L’amour seul était leur devise.
Tout prêts de mourir pour quelqu’un,
Ils mettaient leur bien en commun.
13
Saint Jean ne prêchait que l’amour
Dans ses entretiens ordinaires,
Il disait cent fois dans un jour:
Entr’aimez-vous, mes chers frères,
Mes petits enfants, aimez-vous,
Mes enfants, entr’aimez-vous tous.
14
Voici la réponse qu’il fit
Aux ignorants de ce mystère :
La seule charité suffit,
Il en faut parler sans se taire,
C’est le précepte du Seigneur
Qui suffit pour notre bonheur.
15
Les saints étaient brûlants d’amour
Et de charité pour leurs frères,
Ils leur donnaient et nuit et jour
Quelques secours dans leurs misères,
L’exemple d’un Dieu mort pour nous
Les rendaient de cour tout à tous.
16
Comment n’aimer pas le prochain?
C’est un vif portrait de Dieu même,
C’est un chef-d’œuvre de sa main,
C’est un ami que son cœur aime,
C’est le frère de Jésus-Christ,
C’est le temple du Saint-Esprit.
17
C’est le fils du Père éternel
Par une divine alliance,
C’est l’héritier universel
De son royaume et gloire immense
Qui régnera bientôt aux cieux
Comme un roi grand et glorieux.
18
L’homme est tout empourpré du sang
De Jésus-Christ, mon très cher maître,
S’il n’a pas dans son cœur son rang,
Je suis Judas, encor plus traître.
Un chrétien peut-il faire tort
A ceux pour qui Dieu même est mort?
19
Aime ton frère, bon chrétien,
Sans quoi tu te damnes sans doute.
Encore passe pour un païen
Qui ne sait pas le prix qu’il coûte.
Peux-tu savoir quel est son prix
Et n’en avoir que du mépris?

20
Que dis-je le païen sans foi
A plus d’amitié naturelle
En ce point il te fait la loi,
En ce point il est plus fidèle,
Vois les Turcs dans leur charité,
Sois confus de ta dureté.
21

Mon cœur commence à s’enflammer,
Que mon prochain me semble aimable!
Ah! c’en est fait, je veux l’aimer,
Il est trop juste et raisonnable.
Rien n’est si doux, rien n’est si pur,
Rien n’est si grand, rien n’est si sûr.
22
Mais gare à vous, cet or sacré
Est contrefait des hypocrites,
Leur or brille et semble épuré.
Dans le fond, il est sans mérites,
Ils le nomment la charité;
Devant Dieu, c’est charnalité.
23
Si vous n’aidez votre prochain
Que par principe et par nature,
Hélas! vous travaillez en vain
Et votre aumône est tout impure.
La charité va droit à Dieu,
C’est un feu qui monte en son lieu.
24
L’aimer parce qu’il est parent,
Civil, complaisant, agréable,
Parce qu’il est riche ou savant,
Noble, puissant ou respectable,
Voilà l’amitié d’un païen
Et non pas celle d’un chrétien.
25
Aimez le prochain saintement
Pour la vertu, non pour le crime,
Car l’aimer criminellement
C’est s’offrir au diable en victime.
Loin de vous tout amour charnel,
C’est un feu tendre, mais mortel.
26
26 Aimez du cœur et de la main
Et non seulement de la bouche.
Versez l’aumône dans son sein.
Que ce qui le touche, vous touche !
Toute amitié de compliment
Est un ridicule ornement.
27
Que votre amour s’étende à tous,
N’ayez de froideur pour personne.
C’est mon ennemi, dites-vous;
N’importe, il faut, Dieu l’ordonne.
Fuyez la singularité,
Car elle rompt la charité.
28
L’amour est doux et patient
Et plein de support pour son frère,
Il est docile et complaisant,
Exempt de trouble et de colère.
Supportez-le dans ses défauts,
Dieu vous charge de ses fardeaux.
29
Vous devez aimer vos amis,
Rien n’est si facile en pratique;
Mais aimez tous vos ennemis,
C’est l’acte le plus héroïque
Qu’il vous faire absolument
Ou vous perdre éternellement.
30
Il faut aimer du fond du cœur
Un ennemi qui veut vous nuire;
C’est le précepte du Seigneur,
Il faut s’y soumettre et souscrire,
Sous peine de péché mortel
Et d’un repentir éternel.
31
Dieu donne à tous, même aux pécheurs,
Sa douce pluie et sa lumière;
Aimons donc nos persécuteurs
Afin d’imiter ce bon Père,
Qui, par son immense bonté,
Surmonte toute iniquité.
32
Sans cet amour, sans ce pardon,
Dieu n’accepte aucun sacrifice,
On serait martyr du démon
Au milieu du plus grand supplice,
Ni l’aumône de tout son bien,
Sans ce pardon, ne sert de rien.
33
Un homme dans l’inimitié
Demande à Dieu dans sa prière
Qu’il le regarde sans pitié
Et qu’il rallume sa colère;
Il ne dit jamais son Pater
Qu’il ne se condamne à l’enfer.
34
L’inimitié tourne en poison
Toutes les sources de la vie,
Les sacrements et l’oraison.
Tout est un sacrilège impie
Et le vindicatif de cœur
Se perd malgré tout confesseur.
35
La plus merveilleuse action,
Si la charité ne s’y trouve,
Est une pure illusion,
Et Dieu la rejette et réprouve.
Elle a les dehors de bonté
Et n’est au fond qu’iniquité.
36
Il n’appartient qu’à des héros
De ne tirer jamais vengeance,
De souffrir pour Dieu tous les maux
Dans la paix et dans le silence.
Quand on se venge et l’on s’aigrit,
On marque son petit esprit.
37
Les saints n’ont-ils pas pardonné,
N’ont-ils pas remis toute injure?
C’est pourquoi Dieu leur a donné
Ses biens sans nombre et sans mesure.
Dieu n’est que libéralité
Envers un cœur de charité.
38
L’homme qui pardonne le mal
Est plus qu’un homme, il se surpasse.
Cette victoire est sans égal
Dans la nature et dans la grâce,
C’est un vainqueur si glorieux
Qu’il n’est connu que dans les cieux.

39
Pardonnez puisque le Seigneur
Par pure bonté vous pardonne,
Il est pour vous tout de douceur
Et vous n’en auriez pour personne.
Dites-moi: serez-vous sauvé
Si Dieu vous prend au pied levé?
40
Jésus pardonne à ses bourreaux,
Il prie en leur faveur son Père.
Vous fait-on bien autant de maux,
Autant de sujets de colère:
Un Dieu mourant pardonne à tous.
Pécheur, calmez votre courroux.
41

Quelle rage de mépriser
Un Dieu qui pardonne et qui prie,
Qui tend les bras pour embrasser
Ceux qui lui font perdre la vie!
Vindicatif, va te venger
Et dans l’enfer va te plonger.
42
Méprise la croix de Jésus,
Avec les bourreaux frappe et crie
Pour venger tes affronts reçus.
Chicane, mal parle, injurie,
Arrache ici-bas dents pour dents
Pour brûler dans des feux ardents.
43
Bon courage, il faut pardonner
Quoique tout frissonne et murmure,
Il ne faut pas s’en étonner,
L’acte est contraire à la nature,
Mais ce pardon si généreux
Ravira tous les bienheureux.
44
Surmontez le qu’en dira-t-on,
Arrêtez votre chair qui gronde
Et montez par sur la raison
A la victoire sans seconde;
Pardonnez à vos ennemis,
Aimez-les comme vos amis.
45
Les bons ici-bas vous loueront,
Les anges chanteront victoire,
Les saint avec Dieu s’écrieront:
Cet homme est digne de la gloire
Puisqu’il imite son Sauveur
En pardonnant de tout cœur.
46
Sans tarder, allez promptement
Voir cette personne contraire
Et lui demander humblement
Pardon, mais pardon sincère,
Et n’en craignez pas un rebut
Puisque Dieu seul est votre but.
47
Dût-on rebuter vos pardons,
Vous ne pouvez vous en défendre,
Car ils deviendront des charbons
Pour le gagner ou mettre en cendre.
On gagne plus par un pardon
Que par la force et la raison.
48
Mais pardonnez sincèrement
Sans garder aucune amertume,
Du fond du cœur entièrement,
Sans froid qui glace et qui consume,
Avec un visage serein,
Ouvrant le cœur avec la main.
49
Pardonnez sans condition,
Parlez-lui, rendez-lui visite,
Servez-le dans l’occasion;
Ce pardon n’est point hypocrite
En vous gardant d’un certain mais
Qui damne une âme pour jamais.
50
Tâchez donc de trouver moyen
De rendre à cet homme service;
Pour le mal, faites-lui du bien,
Dieu parle, il faut qu’on obéisse.
Un pardon de pur compliment
Est un mauvais pardon qui ment.
51
Oubliez tout le passé
Aussitôt que la paix est faite.
Souvent un accord est cassé
Par une mémoire indiscrète,
Ne pensant plus à l’avenir
Qu’à s’entr’aimer et soutenir.
52
Demandez pardon le premier,
N’attendez pas qu’on vous devance,
Car qui pardonne le dernier
N’a presque point de récompense,
Et si vous n’avez aucun tort,
C’est le plus héroïque effort.
53
Vous êtes tout de charité
En mon endroit, Seigneur mon Père,
Et je suis tout de dureté
Envers mon prochain et mon frère.
Pardon, je connais mon péché,
Et j’en suis vivement touché.
54
Pour mon prochain je veux garder
Mes biens et mon corps et mon âme:
Mes biens afin de l’en aider,
Mon cœur pour brûler de sa flamme,
Mes yeux pour m’en laisser charmer,
Tout ce que je suis pour l’aimer.
55
Seigneur, n’ayant point de retour
Digne de votre amour extrême,
Faites que j’aille nuit et jour
Crier partout que l’on vous aime,
Et pour sauver par quelque effort
Celui pour qui vous êtes mort.
56
L’âne tombe dans un fossé
On le relève avec adresse.
Mon frère est tombé, fracassé,
Et je le verrais sans tristesse.
Mon Dieu, je veux le relever,
Envoyez-moi pour le sauver.
57
Donnez à mon cœur toute ardeur,
A mon esprit toute lumière,
A mon corps même la vigueur
Pour l’aider en toute manière,
Pour l’élever de ces bas lieux
Jusque dans le plus haut des cieux.

Dieu Seul